MARKETING – En italien, ils sonnent bien. Mais côté français, pour d’obscures raisons, ils perdent leur âme. Top 10, avec une nette préférence pour cette dernière décennie.
- 1) Non pensarci – Ciao Stefano de Gianni Zanasi (2007)

Un seul argument paraît valable pour aller voir cette comédie au réalisateur et aux acteurs méconnus : sa nationalité italienne. Alors, afin de séduire les spectateurs français un peu niais, autant prendre un mot exotique que tout le monde connaît, "Ciao" !
Quant à Stefano, il s’agit juste du personnage principal. Ne cherchons pas midi à 14 heures.
- 2) I Vitelloni – Les Inutiles de Federico Fellini (1953)
Mauvais, le titre traduit ne prendra jamais.
En argot italien, le terme "vitellone" veut dire "glandeur". Trop vulgaire.
- 3) Io sono Li – La Petite Venise d’Andrea Segre (2012)
Chioggia ? C’est dans la lagune, ça fait toujours rêver… Va pour La Petite Venise !
Moins terrible, mais dans la même lignée géographique, Dieci inverni ("dix hivers") de Valerio Miel devient Dix hivers à Venise (tant pis si l’action se passe parfois à Moscou) et Un giorno speciale ("un jour spécial") de Francesca Comencini Une journée à Rome. Vive le tourisme !
- 4) Nuovomondo – Golden Door d’Emanuele Crialese (2006)
Avec Golden Door, on pense tout de suite gros budget, Tom Cruise, effets spéciaux…
Qu’importe si l’acteur principal se nomme en fait Vincenzo Amato.
- 5) Mine vaganti – Le premier qui l’a dit de Ferzan Ozpetek (2010)
Déjà, les "Fées ignorantes" (Fate ignoranti) du même cinéaste ont été baptisées Tableau de famille en 2001. Trop subtil pour les Français, ce Ferzan.
- 6) Romanzo di una strage – Piazza Fontana de Marco Tullio Giordana (2012)
Son "Roman d’un massacre" n’est pas assez évocateur… Alors on lui a donne simplement pour nom le lieu de l’attentat milanais qu’il retrace, la place Fontana.
- 7) Accattone – Accatone de Pier Paolo Pasolini (1961)
Il peut se consoler en sachant que, quelques années auparavant, Le Voleur de bicyclette de Vittorio de Sica se trouvait, lui, bien esseulé : en Italie, le titre est au pluriel, Ladri di biciclette ("Voleurs de bicyclette").
En passant la frontière, certaines lettres se font la malle.
- 8) Pane e tulipani – Pain, tulipes et comédie de Silvio Soldini (2001)
En France, la critique boude le cinéma transalpin contemporain. Alors, pour lui rappeler la grande époque des comédies de Luigi Comencini (comme Pain, amour et fantaisie en 1953), on rallonge un peu la sauce pour ce film de Silvio Soldini, sorti en 2001.
"Pain et tulipes" a certainement autre allure sous l'appellation Pain, tulipes et comédie. Qu'on se le dise : ceci n'est pas un drame.
- 9) Il sorpasso – Le Fanfaron de Dino Risi (1962)
De là à supprimer du titre toute idée de "Dépassement" ("Sorpasso"), réel ou métaphorique…
On gagne, par-dessus le marché, un mot qui vieillit mal : Le Fanfaron.
- 10) Ultimo bacio et Baciami ancora – Juste un baiser et Encore un baiser de Gabriele Muccino (2002 et 2010)
L’histoire se répète huit ans plus tard, pour la sortie du deuxième opus. "Embrasse-moi encore" perd son ton impératif : Encore un baiser.
Peut mieux faire.

Je me suis beaucoup amusée a lire cet article!bravo ou brava,pour le dire en italien;)
RépondreSupprimerCla s
Assez curieusement, je ne suis pas d'accord pour LE FANFARON, qui renvoie à la personnalité envahissante de Bruno Cortona. ("Le monde est plein de Bruno Cortona", nous prévenait déjà Dino Risi. Depuis cette époque, ils se sont multipliés de façon exponentielle !)
RépondreSupprimerCela dit, voici quelques perles de mon cru, où l'on soupçonne à la fois l'incompétence des traducteurs, mais aussi un complexe de supériorité bien français.
1) IO NON HO PAURA qui devient L'ÉTÉ OÙ J'AI GRANDI, c'est carrément du sabotage pour cet oppressant suspense de Gabriele Salvatores transformé en "film de vacances".
2) Un des plus grands mystères ex-aequo : a) pourquoi diable GLI INDIFFERENTI, un des meilleurs films de Francesco Maselli (1964), n'est pas traduit par LES INDIFFÉRENTS ? Fallait-il vraiment que ça s'appelle LES DEUX RIVALES ?
et b) pourquoi diable PARENTI SERPENTI (1992), un excellent Monicelli, ne s'est pas appelé PARENTS SERPENTS mais bêtement UNE FAMILLE FORMIDABLE ? Sabotage, sabotage !
Marc Provencher
Eh eh... Merci pour ces ajouts : du sabotage, effectivement !
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